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Les services de médecine préventive de la fonction publique territoriale

La fonction publique territoriale dispose de services de médecine préventive avec des missions et une organisation particulières. Les médecins du travail et le personnel qui assurent les actions sur le milieu de travail et la surveillance médicale des agents suivent des règles propres, différentes de celles du service de prévention et santé au travail.

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Les fonctionnaires et les agents contractuels de la fonction publique territoriale sont suivis par des services de médecine préventive. La fonction publique d’état dépend des services de médecine de prévention et la fonction publique hospitalière des services de prévention et de santé au travail, avec des dispositions particulières. Enfin, la médecine de prévention dans les armées a une organisation spécifique.

Les missions

Les missions du service de médecine préventive sont assurées par les membres d’une équipe pluridisciplinaire animée et coordonnée par un médecin du travail appartenant :

  • soit au service créé par la collectivité ou l’établissement ;
  • soit à un service commun à plusieurs employeurs publics ;
  • soit au service créé par le centre de gestion de la fonction publique territoriale ;
  • soit à un service de prévention et santé au travail avec lequel la collectivité ou l’établissement passe une convention après avis du comité social territorial. Dans ce cas, les articles du code du travail régissant les organes de surveillance et de consultation des services de prévention et santé au travail interentreprises ne s’appliquent pas et le comité social territorial compétent est informé pour avis de l’organisation et des modalités de fonctionnement de ce secteur médical ;
  • soit à un service de santé au travail en agriculture avec lequel l’autorité territoriale passe une convention ;
  • soit, à défaut, à un organisme à but non lucratif dont l’objet social couvre la médecine du travail, et avec lequel la collectivité ou l’établissement conclut une convention, après avis du comité social territorial.

Le service de médecine préventive dispose des locaux, matériels et équipements lui permettant d’assurer ses missions. Les médecins peuvent être assistés par du personnel infirmier et, le cas échéant, par du personnel de secrétariat médico-social. Le service de médecine préventive peut accueillir des collaborateurs médecins. Il peut également accueillir des internes en médecine du travail.

Afin d’assurer la mise en œuvre des compétences médicales, paramédicales, techniques et organisationnelles nécessaires à la prévention des risques professionnels et à l’amélioration des conditions de travail, les services de médecine préventive peuvent faire appel aux côtés du médecin du travail et des infirmiers en santé au travail et de secrétariat médico-social, à des professionnels de la santé au travail ou à des organismes possédant des compétences dans ces domaines. Les professionnels de santé au travail peuvent recourir, pour l’exercice de leurs missions, à des pratiques médicales à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication. Préalablement au recours à ces pratiques, l’agent en est informé et son consentement est recueilli par écrit. Les conditions de mise en œuvre de ces pratiques assurent le respect de la confidentialité.

Il appartient au médecin du travail d’évaluer, dans le cadre de sa mission d’animation et de coordination du service, l’opportunité de la téléconsultation en médecine du travail, notamment au regard du motif de la visite, des moyens du service et du poste d’affectation des agents.

L’organisation

Le service de médecine préventive ainsi constitué est placé sous la responsabilité de l’autorité territoriale ; il est animé et coordonnée par le médecin du travail. L’indépendance des personnes et organismes associés extérieurs à l’administration est garantie dans le cadre d’une convention qui précise :

  • Les actions qui leur sont confiées et les modalités de leur exercice ;
  • Les moyens mis à leur disposition ainsi que les règles assurant leur accès aux lieux de travail et les conditions d’accomplissement de leurs missions, notamment celles propres à assurer la libre présentation de leurs observations ou propositions.

Les services sociaux peuvent être associés à la mise en œuvre des actions menées par l’équipe pluridisciplinaire.

Le temps minimal que le médecin du travail doit consacrer à ses missions est fixé à 1 heure par mois :

  • pour 20 agents ;
  • pour 10 agents en surveillance médicale particulière.

Le médecin du travail exerce son activité médicale, en toute indépendance et dans le respect des dispositions du code de la santé publique. Il agit dans l’intérêt exclusif de la santé et de la sécurité des agents dont il assure la surveillance médicale. Ce médecin ne peut être chargé des visites d’aptitude des fonctionnaires territoriaux qui relèvent du médecin agréé ou du conseil médical. Il ne peut être médecin de contrôle. Il peut formuler un avis ou émettre des propositions lors de l’affectation de l’agent au poste de travail au vu de ses particularités et au regard de l’état de santé de l’agent. Dans ce cas, les rôles respectifs du médecin du travail et du médecin agréé s’exercent de façon complémentaire : le médecin agréé vérifie l’aptitude à l’exercice d’un emploi public correspondant aux fonctions postulées ; le médecin du travail vérifie la compatibilité de l’état de santé de l’agent avec les conditions de travail liées au poste occupé par l’agent.

Le médecin du travail reçoit de l’autorité territoriale, de celle du centre de gestion lorsqu’il appartient à celui-ci, une lettre de mission précisant les services pour lesquels il est compétent, les objectifs de ses fonctions, les conditions d’exercice de ses missions ainsi que le temps de travail à accomplir. Lorsque l’autorité territoriale décide de ne pas renouveler l’engagement d’un médecin du travail, pour un motif tiré du changement dans les modalités d’organisation et de fonctionnement du service de médecine préventive, elle en informe le comité social territorial en lui communiquant les raisons de ce changement.

En cas de rupture du lien contractuel pour un motif disciplinaire ou lié à la personne du médecin, cette rupture ne peut intervenir qu’après avis du comité social territorial. L’autorité territoriale met en outre l’intéressé en mesure de consulter son dossier. Le médecin doit faire l’objet d’une convocation écrite lui indiquant l’objet de celle-ci. Au cours de l’entretien, l’autorité territoriale est tenue d’indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les observations de l’intéressé. L’avis émis par le comité est communiqué sans délai au médecin ainsi qu’à l’autorité territoriale, qui statue par décision motivée. L’autorité territoriale informe le comité de sa décision.

En cas de faute professionnelle d’ordre déontologique, l’autorité administrative engage la procédure devant la chambre disciplinaire de première instance. Elle peut suspendre le lien contractuel avec le médecin du travail en attendant la décision du conseil de l’ordre des médecins.

Tout docteur en médecine, pour être engagé dans un service de médecine préventive, doit être spécialiste qualifié en médecine et santé au travail. L’autorité territoriale organise l’accès des médecins du travail à la formation continue. Elle leur permet également de satisfaire à leur obligation de développement professionnel continu.

Le médecin du travail fixe les objectifs et modalités de fonctionnement du service de médecine préventive dans un protocole formalisé applicable :

  • Aux collaborateurs médecins ;
  • Aux infirmiers.

Les activités des autres membres de l’équipe pluridisciplinaire font également l’objet d’une formalisation écrite. Pour les professions dont les conditions d’exercice relèvent du code de la santé publique, ces activités sont exercées dans la limite des compétences respectives des professionnels de santé déterminées par les dispositions de ce code.

Les actions sur le milieu professionnel

Le service de médecine préventive conseille l’autorité territoriale, les agents et leurs représentants en ce qui concerne notamment :

  • L’amélioration des conditions de vie et de travail dans les services ;
  • L’évaluation des risques professionnels ;
  • La protection des agents contre l’ensemble des nuisances et les risques d’accidents de service ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel ;
  • L’adaptation des postes, des techniques et des rythmes de travail à la physiologie humaine, en vue de contribuer au maintien dans l’emploi des agents ;
  • L’hygiène générale des locaux de service ;
  • L’hygiène dans les restaurants administratifs ;
  • L’information sanitaire.

Dans chaque service d’une collectivité territoriale et dans chaque établissement public relevant d’une collectivité territoriale, le médecin du travail établit et tient à jour, en liaison avec l’agent territorial désigné pour assurer la mise en ouvre des règles d’hygiène et de sécurité et après consultation du comité social territorial, une fiche sur laquelle sont consignés les risques professionnels propres au service et les effectifs d’agents exposés à ces risques.

Le médecin du travail a accès aux informations lui permettant d’établir la fiche des risques professionnels. Cette fiche est établie dans les conditions prévues par le code du travail. Elle est communiquée à l’autorité territoriale, qui l’annexe au document unique d’évaluation des risques professionnels . Elle est tenue à la disposition des agents chargés des fonctions d’inspection. Elle est présentée au comité social territorial, en même temps que le rapport annuel du médecin du travail. Le comité social territorial est, en outre, régulièrement informé de l’évolution des risques professionnels entrant dans son champ de compétence.

Le médecin du travail assiste de plein droit aux séances du comité social territorial avec voix consultative. Il signale par écrit, à l’autorité territoriale, les risques pour la santé des agents qu’il constate et qui sont en rapport avec le milieu de travail. Le service de médecine préventive est associé aux actions de formation à l’hygiène et à la sécurité.

Le service de médecine préventive est consulté sur les projets de construction ou aménagements importants des bâtiments administratifs et techniques et de modifications apportées aux équipements ainsi que ceux liés aux nouvelles technologies. Il peut procéder à toute étude et soumettre des propositions. Il formule des propositions sur l’accessibilité des locaux aux agents handicapés. Il est obligatoirement informé, avant toute utilisation de substances ou produits dangereux, de la composition de ces produits et de la nature de ces substances, ainsi que de leurs modalités d’emploi. L’autorité territoriale transmet au médecin du travail les fiches de données de sécurité délivrées par les fournisseurs de ces produits.

Le service de médecine préventive peut demander à l’autorité territoriale de faire effectuer des prélèvements et des mesures aux fins d’analyses. Le refus de celle-ci doit être motivé. Le service de médecine préventive informe le comité social territorial de toutes mesures et analyses. Il participe aux études et enquêtes épidémiologiques.

Le médecin du travail doit consacrer à sa mission en milieu de travail au moins un tiers du temps dont il dispose. Les membres de l’équipe pluridisciplinaire participent aux actions sur le milieu de travail. Tous ont libre accès aux lieux et aux locaux de travail.

La surveillance médicale des agents

Les agents des collectivités et établissements bénéficient d’une visite d’information et de prévention au minimum tous les 2 ans. Cette visite peut être réalisée par le médecin du travail, un collaborateur médecin ou un infirmier dans le cadre d’un protocole formalisé. La visite d’information et de prévention a pour objet :

  • D’interroger l’agent sur son état de santé ;
  • De l’informer sur les risques éventuels auxquels l’expose son poste de travail ;
  • De le sensibiliser sur les moyens de prévention à mettre en œuvre ;
  • D’identifier si son état de santé ou les risques auxquels il est exposé nécessitent une orientation vers le médecin du travail ;
  • De l’informer sur les modalités de suivi de son état de santé par le service et sur la possibilité dont il dispose, à tout moment, de bénéficier d’une visite à sa demande avec le médecin du travail.

A l’issue de toute visite d’information et de prévention, si elle n’est pas réalisée par le médecin du travail, le professionnel de santé qui a effectué cette visite peut, s’il l’estime nécessaire, orienter sans délai l’agent vers le médecin du travail dans le respect du protocole. Il informe l’agent de la possibilité d’être reçu par un médecin du travail.

Les agents fournissent à leur administration la preuve qu’ils ont satisfait à cette obligation. Pour les fonctionnaires territoriaux nommés dans plusieurs emplois permanents à temps non complet, cette visite d’information et de prévention se déroule dans la collectivité qui emploie le fonctionnaire pendant la quotité horaire hebdomadaire la plus longue.

En sus de la visite d’information et de prévention, le médecin du travail exerce une surveillance médicale particulière à l’égard :

  • Des personnes en situation de handicap ;
  • Des femmes enceintes, venant d’accoucher ou allaitantes ;
  • Des agents réintégrés après un congé de longue maladie ou de longue durée ;
  • Des agents occupant des postes dans des services comportant des risques spéciaux ;
  • Des agents souffrant de pathologies particulières.

Le médecin du travail définit la fréquence et la nature du suivi que comporte cette surveillance médicale. Ces visites présentent un caractère obligatoire.

Indépendamment du suivi, l’agent peut bénéficier à sa demande d’une visite avec le médecin du travail ou un membre du service de médecine préventive sans que l’administration ait à en connaître le motif. L’autorité territoriale peut demander au médecin du travail de recevoir un agent. Elle doit informer l’agent de cette démarche.

Le médecin du travail peut réaliser, prescrire ou recommander les examens complémentaires nécessaires :

  • A la détermination de la compatibilité entre le poste de travail et l’état de santé de l’agent, notamment au dépistage des affections pouvant entraîner une contre-indication à ce poste de travail ;
  • Au dépistage d’une maladie professionnelle ou à caractère professionnel susceptible de résulter de l’activité professionnelle de l’agent ;
  • Au dépistage des maladies dangereuses pour l’entourage professionnel de l’agent.

La prise en charge financière des frais occasionnés par ces examens incombe à l’employeur. Dans le respect du secret médical, le médecin du travail informe l’autorité territoriale de tout risque d’épidémie. Des autorisations d’absence sont accordées par l’autorité territoriale pour permettre aux agents de bénéficier des examens médicaux et des visites avec le médecin ou un autre membre de l’équipe pluridisciplinaire.

Le médecin du travail est seul habilité à proposer des aménagements de poste de travail ou de conditions d’exercice des fonctions, justifiés par l’âge, la résistance physique ou l’état de santé des agents. Il peut également proposer des aménagements temporaires de postes de travail ou de conditions d’exercice des fonctions au bénéfice des femmes enceintes, venant d’accoucher ou allaitantes.

Lorsque l’autorité territoriale ne suit pas l’avis du service de médecine préventive, sa décision doit être motivée par écrit et le comité social territorial doit en être tenu informé. En cas de contestation par les agents intéressés des propositions formulées par le médecin du travail, l’autorité territoriale peut saisir pour avis le médecin inspecteur du travail territorialement compétent.

Le service de médecine préventive est informé par l’autorité territoriale dans les plus brefs délais de chaque accident de service et de chaque maladie professionnelle ou à caractère professionnel. Il établit chaque année un rapport d’activité qui est transmis à l’autorité territoriale et au comité social territorial. Un exemplaire en est transmis au centre de gestion qui établit un rapport de synthèse de l’ensemble des rapports d’activité qu’il a reçus et le transmet au Conseil supérieur de la fonction publique territoriale.

Un dossier médical en santé au travail est constitué sous la responsabilité du médecin du travail. La tenue de ce dossier garantit le respect des règles de confidentialité et du secret professionnel. Lors du premier examen médical, le médecin du travail retrace les informations relatives à l’état de santé de l’agent ainsi que les avis des différentes instances médicales formulés. En cas de changement de service de médecine préventive assurant le suivi d’un agent, son dossier médical en santé au travail est communiqué au médecin du travail pour assurer la continuité de la prise en charge, sous réserve du recueil par écrit du consentement préalable de l’agent.

Philippe Casanova

Médecin spécialiste en médecine du travail et médecine légale.